Comment la Garantie Jeunes s’intègre-t-elle dans un territoire rural ?
La Mission Locale du Pays de Sancerre-Sologne (18) couvre un territoire rural qui s’étend sur 65 km. Dans ce contexte, la mobilité des jeunes comme des professionnels est un élément déterminant pour réussir la mise en oeuvre de la Garantie Jeunes. Pascale Leroy, conseillère référente de l’expérimentation au sein de la Mission Locale, revient sur les solutions mises en place ou envisagées pour répondre aux spécificités de son territoire.
Légende : Le territoire de la Mission Locale Sancerre Sologne couvre 7 cantons et s'étend sur 65 km.
Pouvez-vous nous présenter la configuration de votre territoire en quelques mots ?
La Mission Locale Sancerre-Sologne intervient principalement dans le nord du département du Cher, en région Centre. Notre couvrons 56 communes, dont les plus importantes sont Aubigny-Sur-Nère avec 6500 habitants et Sancerre, avec 1800 habitants. Il y a 50 km d’écart entre ces deux villes et le reste du territoire est composé de petites communes rurales.
L’activité économique se situe principalement à Aubigny-sur-Nère. C’est une économie diversifiée mais plutôt centrée sur l’industrie et le commerce. A Sancerre, la viticulture est l’activité principale.
Pour quelles raisons la Mission Locale de Sancerre-Sologne s’est-elle engagée dans la Garantie Jeunes ?
Ce sont les échanges avec les Missions Locales d’autres territoires impliquées depuis plusieurs mois qui nous ont montré l’intérêt de cette démarche, notamment en ce qui concerne le collectif et ses effets positifs pour les jeunes.
Quelles sont les adaptations que vous avez proposées pour que tous les jeunes de votre territoire puissent se rendre à la Mission Locale lors des premiers temps en collectif ?
Idéalement, nous aurions aimé alterner les premières semaines en collectif entre Aubigny, où se trouve notre siège et Sancerre, notre antenne. Cela paraissait logique pour garantir l’accès de tous les jeunes à cette démarche.
Beaucoup de jeunes habitent dans des villages isolés, souvent mal desservis par les transports publics. Ils ne peuvent pas se déplacer quotidiennement à Aubigny. Malgré les efforts et les solutions recherchées avec les collectivités, nous n’avons pas pu trouver de locaux disponibles à Sancerre.
Les jeunes du premier groupe étaient mobiles, nous avions fait en sorte que ce soit le cas pour faciliter le démarrage de l’expérimentation. Mais dès le second groupe, il a fallu mettre en place un système de transport privé pour les jeunes qui habitent dans des villages isolés. En effet, le réseau de transports public est limité. Nous mobilisons toutes les solutions possibles : covoiturage, transports scolaires, etc.
Mais ces solutions ne sont pas optimales : tout l’été, par exemple, les jeunes n’ont pas pu profiter des transports scolaires et les horaires ne sont pas toujours compatibles. Et souvent les lieux de dépôt des bus restent éloignés des lieux de résidence des jeunes.
Nous avons donc fait le choix de louer un minibus avec chauffeur. Ce dernier organise avec les jeunes leur transport matin et soir.
Nous avons dû aménager légèrement les horaires des temps en collectif. Compte tenu de l’éloignement de certains jeunes, il apparaissait évident qu’il fallait que nous leur mettions une salle à disposition pour déjeuner.
Quel est le coût de ces initiatives ?
Les contraintes liées au milieu rural et à la mobilité des jeunes en particulier n’ont pas été anticipées lors de la conception de la Garantie Jeunes. Les initiatives que nous mettons en place représentent un coût important et qui a un impact fort sur le budget qui nous est alloué.
A titre d’exemple, le coût de notre transporteur avec chauffeur est de 180 € / jour TTC. Pour 2016 c’est un budget de 20000 € que nous allons dédier au transport des jeunes pour qu’ils participent aux premiers temps en collectif.
Plus globalement, nous sommes dans un territoire rural, où le nombre d’employeurs est limité et les jeunes peu mobiles. Nous aurons donc des difficultés à atteindre les 80 jours d’immersion professionnelle par jeune comme le prévoit l’instruction financière de la Garantie Jeunes. Cela représente donc un risque financier pour notre structure.
Et dans votre organisation au sein de l’équipe, faites-vous face à des contraintes spécifiques ?
Telle que l’expérimentation a été conçue, il est prévu que deux équivalents temps plein (ETP) soient dédiés à la mise en œuvre de l’expérimentation au sein de notre structure. Mais notre territoire est tellement large et peu desservi par les transports publics que nous allons forcément être amenés à réfléchir à l’évolution de notre organisation en interne.
En effet, en tant que « conseillers Garantie Jeunes », si nous devons nous déplacer dans des communes situées à 60km pour réaliser le bilan de stage d’un jeune, cela va représenter des frais de déplacements très importants et du temps pendant lequel nous ne pourrons pas être disponibles pour accompagner les autres jeunes et aller vers les entreprises.
Comment travaillez-vous avec les jeunes pour pallier les contraintes liées à la mobilité et leur permettre, malgré tout, d’accéder à l’emploi ?
Il faut fonctionner au cas par cas. Pour les jeunes peu mobiles immédiatement, on recherche des lieux de stage ou des emplois à proximité de chez eux. On peut là aussi rechercher des solutions comme le covoiturage, ou accompagner les jeunes pour qu’ils passent leur permis.
Beaucoup des jeunes que l’on accompagne en Garantie Jeunes ont débuté les cours de code et de conduite. Nous avons un très bon partenariat avec les auto-écoles du territoire et le Conseil régional soutient financièrement tous les jeunes au démarrage de leur apprentissage de la conduite. Ils peuvent également obtenir un soutien financier via le Fonds d’aide aux jeunes (FAJ) à hauteur de 457 €.
L’allocation Garantie Jeunes vient en plus de ces aides et permet aux jeunes de démarrer rapidement les cours de conduite. Sur le premier groupe, 3 jeunes sur 12 ont commencé l’auto-école. Dans le deuxième groupe, 6 jeunes sont concernés.
