« A travers le bénévolat, les jeunes construisent leur projet professionnel »
Saadi Fermas, conseiller à la Mission Locale de Creil. En lien avec plusieurs partenaires du territoire, la Mission Locale de Creil propose aux jeunes de s’engager dans une mission bénévole. Aujourd’hui, le nombre d’associations qui ouvrent leurs portes aux jeunes augmente et les missions proposées sont variées. Saadi Fermas revient sur l’intérêt de ces expériences pour les jeunes et explique comment elles s’inscrivent dans un projet de territoire.
Sur la photo : des jeunes suivis par la Mission Locale participent à des activités dans une maison de retraite voisine.
Comment vous est venue l’idée de développer des actions autour du bénévolat sur votre territoire ?
« En tant que conseiller référent sur le décrochage scolaire, je recevais beaucoup de mineurs, âgés de 16 à 18 ans. Pour ce public, il est difficile d’accéder à des formations financées par la Région [Picardie] tout comme à des emplois. On a donc réfléchi aux actions à initier pour que ces jeunes puissent développer des compétences et se constituer progressivement un CV.
Parmi ces jeunes, certains ont décroché avant le stage de 3ème et n’ont aucune expérience à caractère professionnel, ou presque. A travers l’engagement bénévole, ils peuvent tester, découvrir des structures et des métiers, et se construire progressivement leur projet.
En quoi ont consisté ces premières expérimentations ?
Au sein de la Mission Locale, dans le cadre du Parrainage pour l’Emploi, nous avons un réseau de parrains qui accompagnent des jeunes dans leurs démarches d’insertion et la construction de leur projet professionnel. Cinq de ces bénévoles actifs se sont réunis autour d’un collectif citoyen, le GR21 (Groupe de réflexion du 21ème siècle).
C’est ce collectif qui nous a sensibilisés d’abord à la convention passée entre l’UNML et l’association France Bénévolat et à celle passée avec les Maisons des Associations. Parmi leurs multiples activités citoyennes, ces bénévoles accompagnaient également un groupe d’étudiants en BTS Economie sociale et familiale. Les étudiants avaient développé un partenariat avec une maison de retraite située à deux pas de la Mission Locale. Régulièrement, ils se rendaient par petits groupes au sein de cet établissement pour réaliser des activités (cuisine, jeux, etc.) avec les personnes âgées.
Le GR21 nous a donc mis en lien avec ce groupe d’étudiants et on a proposé à des jeunes suivis en Mission Locale de participer à ces activités au sein de la maison de retraite. C’est de là que sont nées les premières actions et progressivement, les jeunes ont intégré d’autres associations grâce à notre réseau de parrains.
Quelles sont les compétences que recherchent les associations avec lesquelles vous travaillez ?
Au Secours populaire par exemple, les compétences que vont pouvoir développer les jeunes bénévoles sont très variées : il y a une partie commerciale, où les jeunes sont chargés de récupérer des denrées et des vêtements auprès de partenaires et du public. Il y a une partie logistique, pour organiser le stockage et l’envoi de ces denrées. Certaines missions vont être plus centrées sur l’administratif ou la comptabilité. L’association est présente dans plusieurs localités, ce qui est aussi un point fort, parce que tous les jeunes n’habitent pas à Creil.
Concrètement, comment cet engagement bénévole peut-il être un accélérateur de l’insertion professionnelle des jeunes ?
Récemment, une des jeunes que l’on suivait et qui a décroché en classe de 5ème, a été repérée par le directeur d’une grande surface, qui l’a vue s’activer dans un rayon lors d’une mission de bénévolat. Il l’a testée et l’a trouvée très bien, il devrait lui proposer un contrat au sein du supermarché. Elle est vraiment partante !
Pourtant, avant sa mission bénévole, si je lui avais proposé un stage ou un emploi pour de la mise en rayon, elle m’aurait certainement dit non car ça ne correspondait pas à son projet. Aujourd’hui, accessoirement, elle est prête à faire de la mise en rayon et à occuper d’autres emplois, de manière temporaire. En réalité, elle s’est ouverte au monde du travail, elle a pris confiance et prouvé à un employeur qu’elle était performante et compétente.
Comment les jeunes bénévoles valorisent-ils ces expériences dans la suite de leur parcours ?
Une fois la mission bénévole terminée, le jeune fait le point avec son tuteur. Certains des jeunes sont aussi accompagnés par des parrains au cours de leur mission et au moment du bilan. En tant que conseillers, on les accompagne pour valoriser leur expérience sur leur CV, traduire certains savoir-faire acquis en termes de compétences professionnelles et réfléchir sur les prochaines étapes de leur projet. Au-delà des compétences, c’est aussi le fait qu’ils se soient engagés sans contrepartie financière qui est valorisant.
En décembre 2014, la Mission Locale a organisé une cérémonie de remise des "Passeports Bénévoles"® en présence des jeunes et d’élus notamment. C’était une manière de valoriser l’engagement de ces jeunes et de donner envie à des associations qui n’accueillaient pas encore de bénévoles de s’impliquer.
Avez-vous de nouveaux projets en perspective ?
Oui on a plein de projets ! Les étudiants en BTS avec lesquels on a noué le partenariat pour les missions en maison de retraite interviennent auprès de collégiens pour du soutien scolaire. On a imaginé que des jeunes qui participent à l’expérimentation Garantie Jeunes puissent rencontrer des élèves autour de projets spécifiques et pour échanger sur leurs parcours.
Il y a des passerelles à créer entre les structures, y compris entre les établissements scolaires et les Missions Locales.
