« On pensait de plus en plus « dispositif » avant de penser aux besoins et aux projets des jeunes »

Emmanuel Crouzet, directeur de la Mission Locale du Sénonais (89), a fait appel à un intervenant extérieur afin de sensibiliser son équipe au développement d’une culture commune de l’accompagnement. Une démarche qui peut aller jusqu’à la réalisation d’outils, mais pour laquelle il faut « se donner du temps et qui nécessite d’être toujours actualisée », explique-t-il. Avec Chrystèle Poisson, consultante, ils reviennent sur cette démarche.


A quels besoins répondait la démarche que vous avez choisie d’initier avec l’équipe de la Mission Locale ?

E. Crouzet : l’arrivée de la Garantie jeunes, en 2016, a été l’élément déclencheur. Je nous sentais de plus en plus éloignés de notre cœur de métier, l’accompagnement global des jeunes. On pensait de plus en plus « dispositif » avant de penser à répondre aux besoins et aux projets des jeunes.

Le premier objectif était donc de redonner du sens au travail des conseillers en partageant une même vision de l’accompagnement que nous proposons aux jeunes.

Pourquoi avoir fait appel à un intervenant extérieur ?

E. Crouzet : Cela me semblait important que nous soyons guidés. Ce qui m’a plu dans la démarche du cabinet auquel nous avons fait appel, c’est que ce n’est pas une méthode plaquée d’un territoire à un autre, avec une solution type. L’équipe travaille de manière collective et trouve d’elle-même comment qualifier les différentes étapes de l’accompagnement et les propositions que nous pouvons faire aux jeunes, à partir des pratiques existantes, en fonction des jeunes que nous accueillons et de notre projet de territoire.

Quels sont la méthode et le contenu de la démarche d’accompagnement proposée ?

C. Poisson : Il s’agit d’une formation-action qui se déroule sur 2 mois avec 4 jours de formation en salle et une phase d’ expérimentation, qui peut être proposée à l’ensemble des professionnels d’une structure, ou seulement à un groupe test, pour les Missions Locales avec des effectifs importants. A travers une série de questionnements, nous amenons les professionnels à dresser un état des lieux de ce qui fonctionne et dysfonctionne au quotidien dans le travail d’accompagnement des jeunes et à trouver les solutions pour y remédier.

Ensuite, nous formalisons les éléments qu’ils ont mis en avant : les services rendus aux jeunes, en fonction des besoins et des projets définis avec eux.

Nous pouvons aller jusqu’à l’appui à la formalisation d’outils-repères à destination des conseillers, pour les appuyer dans leur travail avec les jeunes au quotidien.

E. Crouzet : en partant de parcours types de jeunes que nous accompagnons, nous avons défini à la fois un faisceau d’indices nous permettant d’identifier qu’un jeune est proche d’une des situations types et les grands blocs de l’offre d’accompagnement de la Mission Locale. Ces grands blocs ne sont pas une succession d’étapes linéaires par lesquelles passent nécessairement les jeunes. Ils permettent simplement d’avoir une vue d’ensemble de ce que nous pouvons proposer aux jeunes.

Nous avions toujours, en trame de fond, la question suivante : comment remettre le jeune au cœur de l’accompagnement et associer nos partenaires aux réponses que nous apportons.

Quel est, du point de vue de la Mission Locale, le principal intérêt de ce travail ?

E. Crouzet : C’est une démarche qui a permis à l’équipe de développer une culture commune de l’accompagnement.

L’intérêt est aussi de mieux mettre en valeur le travail des professionnels de Missions Locales vis-à-vis de l’extérieur. En effet, trop souvent, on ne s’intéresse qu’à la fin du parcours, à la sortie en emploi notamment. Les étapes qui ont permis d’atteindre l’objectif que l’on s’était fixé avec le jeune sont peu valorisées, alors qu’elles sont indispensables et doivent être partagées avec nos partenaires.

Quelles sont les conditions pour que la démarche porte ses fruits ?

E. Crouzet : il faut tout d’abord que le démarche soit validée et portée par le Conseil d’administration de la Mission Locale. Ensuite, il faut choisir le bon moment pour initier la démarche, de manière à ce que l’équipe soit disposée à consacrer ce temps et à travailler de manière collective. Et il est nécessaire de prévoir des temps de bilans réguliers avec l’équipe, pour faire le point sur la démarche et réajuster les outils que nous avons définis ensemble.

Enfin, les jeunes changent, les propositions que nous leur faisons évoluent, elles aussi. Si nous voulons répondre à leurs besoins et leurs envies, il est essentiel que la démarche soit partagée avec eux : les jeunes doivent en être acteurs et il faut que les ressources que nous leur proposons leur parlent.

C. Poisson : l’implication de l’équipe de direction est essentielle pour que les professionnels se sentent autorisés à questionner leurs pratiques. C’est une démarche dynamique, qui implique d’accepter de se remettre en question.

En savoir plus :

En savoir plus : 40 Missions Locales ont été accompagnées par le cabinet Stoconsult.

Sur le forum PEPS, retrouvez une présentation de la démarche « Structurer les parcours des jeunes en insertion » du cabinet Stoconsult.